vendredi 25 avril 2008

Sans issue?

Il était debout, et il savait qu'il sortirait bientôt. On lui avait dit que c'était possible, mais c'est avec réticence qu'il s'était décidé.
Avant de sortir, il se souvenait des choses réconfortantes qu'on lui avait dites. On venait souvent. D'abord, il entendait la porte qu'on ouvrait. Il ne voyait pas tout cela, parce qu'il tournait le dos à la porte. Cela lui rappelait de trop mauvais souvenirs. Certains hantaient encore son esprit. Les autres étaient presque oubliés.
Après la porte, il y avait le bruit d'une chaise qu'on déplace, puis le silence et la voix monotone qui récitait un discours où se répétaient sans cesse les mêmes recommandations et les mêmes conseils sur sa future sortie.
Grâce à ces paroles ennuyeuses, il n'avait plus peur, et il osait enfin sortir.
Il se retourna, ouvrit la porte et resta sur le seuil, pour habituer ses yeux à la clarté du soleil.
Il était fier de pouvoir enfin sortir, et de surmonter une peur qui était presque viscérale, après ces longs moments passés dans la chambre blanche et stérile.
Il observait les rues, et les revoyait, comme la dernière fois. Elles avaient peu changé.
Il passait le pas de la porte et se rendit compte de son impatience et de son anxiété. D'une certaine façon, ce monde-là lui avait manqué.
Il avançait dans la rue principale. Une plaque indiquait son nom : rue Pascal. Il remarqua une maison, sur sa droite, le n°28. La façade était recouverte de lierre, et par-dessus le mur, on voyait un chèvrefeuille blanc en fleurs. Sur le sol, il remarqua un petit tapis de pensées. L'idée qu'il y ait des lierres, des chèvrefeuilles et des pensées dans la rue Pascal le fit sourire. Il vit, à travers la grille, deux enfants sortir en riant. L'un tenait le cerf-volant, l'autre la longue ficelle, pour le faire voler. A ce moment-là, une énorme explosion lui brisa les tympans.
Avant de tomber, projeté par le choc, il vit les enfants, qui criaient. L'un deux, le plus âgé croyait-il, avait le visage ensanglanté. Ce fut la dernière chose qu'il vit, avant de fermer les yeux. Il s'allongea sur le sol, pour reprendre sa respiration.
Quand il rouvrit les yeux, il vit le cerf-volant s'envoler, haut dans le ciel.
La ficelle était rompue.
Doucement, il s'assit, puis il se releva. Il entendait toujours le cri des enfants, qui faiblissait, qui s'atténuait, peu à peu. Il se retourna et commença à marcher.
Il atteignit la porte, et pensa qu'il lui faudrait beaucoup de temps pour la franchir à nouveau.
Au fond, peut-être devait-il rester dans la pièce éternellement.
Il entra, puis reprit sa position, face au mur, dos à la porte.
Il attendait qu'on revienne.
Sa blessure s'était rouverte, et, comme la corde du cerf-volant, son envie de sortir s'était brisée.
Il devrait patienter encore longtemps.

mercredi 23 avril 2008

Silencieux flocons.

On entendait tomber la neige. Sur les hauts sapins verdoyants et la prairie glacée, les flocons blancs se posaient délicatement, manteau virginal et meurtrier. Le vieux monsieur contemplait ce paysage familier, fabuleux. La buée sur la vitre l’empêchait de bien voir, alors, avec sa manche, il essuya le verre.


Un groupe de gens s’approchait de la jolie maison, à droite de la colline. Elle était belle, cette maison, un vrai chalet suisse dont même le toit était en bois ! Il y avait une bordure sculptée pour cacher la gouttière, et s’il faisait assez froid, la neige formait de petites stalactites de glace. Des étincelles gelées tombaient alors sur le tapis immaculé, le creusant un peu plus à chaque fois.
Quand les jours devenaient plus courts, les nuits se faisaient plus froides, les nuages cachaient le soleil de l’aurore au crépuscule. Il n’y avait plus rien à faire dehors, alors il restait à l’intérieur, près du poêle, enveloppé dans sa couverture de laine. Et il était bien, dans sa petite cabane, il vivait comme il l’entendait. Seul.
Il dormait beaucoup, mangeait peu, observait les alentours. Il n’y avait que peu de passage, surtout en hiver. Quelques chasseurs s’arrêtant une nuit ou deux, des randonneurs qui passaient par là…
Il sortit de sa rêverie pour regarder le groupe avancer prudemment. Il remarqua deux enfants, affairés à faire un bonhomme de neige. La petite fille, tache rouge et remuante, ramassait de petits morceaux de bois, pour les bras, les yeux… Le garçon, probablement plus âgé, s’occupait de constituer la tête du bonhomme. Cette frénésie à créer une chose aussi éphémère l’émut profondément.

Il se souvint de ce jour ensoleillé, il y a cinquante ans de cela. Lui aussi, alors, était chargé du corps du bonhomme de neige. Et une petite fille, vêtue de violet, ramassait elle aussi quelques brindilles, pommes de pin et bout d’écorce, qui seraient bientôt les yeux, les poches, les boutons du costume de ce monsieur de neige, le dernier de la saison, peut-être.
Ce n’était pas facile, de savoir si la neige tiendrait longtemps ou non. Il fallait bien doser la taille du bonhomme, la proportion entre la tête et les deux parties du corps. Si le froid continuait, alors le bonhomme resterait intact. Il y arrivait plutôt bien, en général.
La neige était tombée toute la nuit, mais à présent le soleil froid régnait sur la campagne blanchie. Il avait bientôt fini, il ne manquait plus que la tête. La petite pourrait achever leur belle réalisation. Il recula un peu, pour contempler le bonhomme. Il était vraiment réussi, celui-là !
Il se retourna, pour voir où en était sa sœur dans sa recherche d’accessoires et de décorations. Il ne l’aperçut pas, et pensa qu’elle était entrée dans le petit bois. Là-bas, elle trouverait à coup sur ce qu’elle cherchait.
La petite fille était en effet entrée dans le bois, et elle y avait trouvé nombre de merveilles : une pomme de pin, quelques baies rouges, de gros morceaux d’écorce de bouleau… Elle avait même trouvé un edelweiss !
Elle était ensuite ressortie du bois, espérant trouver deux jolis branchages, pour les bras. C’était important que le bonhomme ait des bras, pour y accrocher un panier avec les graines pour les oiseaux, ou peut-être quelques décorations pour Noël.
Elle scrutait attentivement le sous-bois, même si sur la neige, le bois sombre se voyait assez vite. Elle avait cependant remarqué, en contrebas, un petit tas de bois. Là, elle trouverait !
Elle était descendue doucement, prudemment. La neige n’était pas givrée, donc ça ne glissait pas trop. Plus elle s’approchait, plus elle en était sure : elle avait tous les éléments, cette fois.
Arrivée à la petite pile de bois, elle se mit à détailler une par une les bûchettes : les bras ne devaient être ni trop gros, ni trop lourds, ni trop longs, avec une fourche qui formerait les mains, et pas de feuilles parce qu’elle n’aimait pas les enlever.
Enfin, les voilà ! Elle prit les deux branches dans ses bras, s’assura qu’elle n’avait rien perdu de ses merveilles, et se releva. Elle ne pensait pas que les branches seraient aussi lourdes, et, déséquilibrée, elle tomba.

C’est là qu’il l’avait trouvée, entourée de fleurs et de trésors. Il était resté là un long moment, ne sachant que faire exactement. L’urgence de la situation lui échappait ; la vivacité, immobile à présent, le fascinait.
Il resta là longtemps, en haut de la colline. Quand la neige se remit à tomber doucement, il descendit. Il ramassa les quelques décorations, prit la petite fille dans ses bras, et remonta calmement la pente.


La petite fille en rouge avait fait une couronne, qu’elle posa fièrement sur la tête du bonhomme. Il avait des yeux, des lunettes, un nez, deux bras, une écharpe, et surtout une couronne. Satisfaits, ils rentrèrent dans la jolie maison de bois.
Le vieux monsieur les regarda disparaître dans la chaleur et le confort. Une brise soufflait sur la plaine. Le bonhomme tiendrait sans doute un jour ou deux. Il était beau, ce bonhomme.
Il y avait de la buée sur la vitre, alors, avec sa manche, il essuya. Puis il retourna la boule à neige, et les flocons se mirent à tomber sur le petit chalet de bois. Il les entendait tomber.

lundi 21 avril 2008

Something in the Air Tonight?

You wake up some day, open your eyes and suddenly you don’t remember what was hard the night before. The weight has gone, you feel almost ok. You don’t know why, still, and this frightens you deeply. But you don’t think about that. You think about the lightness you feel, the warm comfort of being here, alive, unharmed. And you don’t know how the weight disappeared byt it’s fine anyway.
And you’re lying down, eyes open and you’re fine the way you are, or so you think. Because this lightness starts to weight upon your shoulders, upon your whole body… And you feel like this lightness is not real. You feel it and it’s not there. And you decide you will not let it take you down. But it’s hard to remain calm, and light as well. Because you know you’re making it up. You know it’s not there, you know it will eventually disappear and most of all you know it’s only some new deception you won’t recover from.

* * *

A tear drops and a smile starts to exist. It would be wonderful to be able to claim that you’re happy, that you feel this lightness and confidence you’ve lacked of for the past few weeks. It would be amazing to say that you are now ready to give this trust again, this incredible belief in someone. It would be wonderful to have someine near you, wonderful. You hope sometime it will happen. But you’re not so sure. Not so sure about anything… About him, about you, about them who no longer exist. Have they ever, or is it all a dream?